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Aujourd'hui, Le Monde et McDonald's co-organisent un débat en partenariat avec la Chaire « Développement Durable » de SciencesPo sur le thème « L'alimentation du 21ème siècle sera-t-elle verte? ».

 Billet d'humeur par Stéphen Kerckhove, délégué général d'Agir pour l'Environnement

Aujourd'hui, 09 décembre, Le Monde et McDonald's co-organisent un débat en partenariat avec la Chaire « Développement Durable » de SciencesPo sur le thème « L'alimentation du 21ème siècle sera-t-elle verte? ».

Avec ce débat, une nouvelle étape est en passe d'être franchie dans la relation ambivalente unissant la société civile, le monde médiatique et certaines multinationales. D'un statut d'accusée, l'industrie de la malbouffe tente d'orchestrer formellement sa mue en soutenant des événements à consonance écologique. Non content de soutenir financièrement de tels événements, McDonald's opte désormais pour une stratégie plus directive en passant du statut de « partenaire » à celui de « co-organisateur », intervenant directement dans la définition du programme et s'octroyant généreusement une place au sein des tables rondes.

De fait, la table ronde organisée par le roi du BigMac est aussi indigeste qu'un menu sursaturé en mauvaises graisses. Sur les intervenants prévus, une majorité est issue de l'industrie de la malbouffe. Chantres de l'autocritique, ces intervenants réussiront-ils l'exercice qui consiste à débattre de l'alimentation verte en dénonçant la structure qu'ils représentent ?

Depuis de nombreuses années, McDonald's tente de verdir son image. Ce colloque sur l'alimentation verte s'inscrit en droite ligne de cette stratégie de verdissement. Que des journaux comme Le Monde ou des institutions comme SciencesPo se prêtent à cette pantalonnade relève le glissement qui s'opère en faveur des pollueurs verts que certains dépeignent comme des « acteurs responsables du développement durable ».

Organiser un débat requiert un minimum d'indépendance par rapport au sujet traité. Ici, l'une des parties prenantes s'achète de l'espace démocratique comme elle achetait auparavant du « temps de cerveau disponible » et de l'espace publicitaire. La stratégie est grossière mais cautionnée par le quotidien de « référence » qu'est Le Monde. De fait, l'agrobuisness acquiert une  pseudo-légitimité qu'elle ne pourrait atteindre en optant pour une campagne publicitaire traditionnelle.

Après avoir gavé des générations de futurs obèses, l'industrie de la malbouffe s'attache désormais à polir son image. A défaut de « penser », les étudiants de SciencesPo auront tout loisir de se remplir la panse à grand coup de hamburgers allégés. La bonne Chair « Développement Durable » de  SciencesDonald's devrait ainsi se délecter d'un partenariat qui devrait lui assurer une fin d'année financière dans le « vert »...

En matière de débat public, le jeu d'acteurs est déterminant. Dans ce jeu de rôle particulièrement ambigüe dans lequel l'un des acteurs devient organisateur, une institution scolaire un faire-valoir et le public une cible marketing, il est peu de dire que le 09 décembre prochain, le greenwashing sera à l'honneur.